programmation au cinéma Latina, novembre 2012,
par François Caillat et Hélène Coppel.

La programmation Les fantômes du réel rassemble des cinéastes qui cherchent comment représenter l’indétermination du monde, ses interstices et ses zones floues. Les quinze films proposés ici s’interrogent sur la question du visible et de l’invisible, ils explorent la porosité du réel : ses creux, ses troubles, ses flottements. Leur objectif n’est pas d’épuiser le sens caché des choses ou des êtres, mais de mettre en scène la complexité et le doute. Ils travaillent dans l’entre-deux, aux confins des ombres et des lumières, dans l’incertitude du présent et les fantômes du passé.

FIGURES. Certains êtres nous hantent et continuent d’irradier le présent. Ils sont des marques invisibles et tenaces. Leurs visages, leurs mots, s’inscrivent sur le monde alentour comme un palimpseste.
Les films « Dernier adieu » de Robert Cahen et « Une Jeunesse amoureuse » (présenté en avant-première) de François Caillat explorent la transparence de la vie.

LIEUX. Le paysage porte jusqu’à nous le passé disparu, ses secrets oubliés. Il raconte la permanence et le renouvellement, il est le témoin du temps et l’allié des fantômes.
Les trois films « Un pont sur la Drina » de Xavier Lukomski, « Profit motive and the whispering wind » de John Gianvito, « Nature et Nostalgie » de Digna Sinke, explorent l’extraordinaire mémoire des lieux.

FRAGMENTS. Les cinéastes inventent des formes pour exprimer la perméabilité du réel. Ils cherchent un langage où la matière du cinéma serait contaminée par l’incertitude et la fugacité.
Les essais poétiques « L’empreinte » et « Corps flottants » de Robert Cahen, les films « Le battement d’ailes d’un papillon » de Alexandr Balagura et « Trois Soldats allemands » de François Caillat participent pleinement au mystère du monde.

TRACES. Les cinéastes attentifs au passé cherchent une manière de l’approcher, lui rendre vie, le toucher. Ils suivent des pistes, regardent des empreintes, s’interrogent à l’aune des signes disponibles.
« Ernesto Che Guevara, le journal de Bolivie » de Richard Dindo et « Nostalgie de la lumière » de Patricio Guzman mènent leur quête aux confins de la vie et de la mort.

ABSENCES. Des cinéastes convoquent leurs disparus. Ils les interpellent et les font exister dans un nouveau récit. Peu soucieux de mener une enquête policière ou de résoudre l’énigme, ils s’égarent en chemin et se laissent volontiers déborder par la tentation romanesque.
Les films « Sotchi 255 » de Jean-Claude Taki, « Près du corps » de Gaëlle Douël et « Surgi dans la brume dans un rugissement strident » de Christine Marrou racontent des absences qui ne seront jamais comblées.

En clôture de cette programmation, le film d’Alain Resnais « L’année dernière à Marienbad » met en scène des personnages fantomatiques dans une narration éclatée et une chronologie défaite. Il reste le modèle d’un cinéma de la fragmentation et de l’incertitude.

Le cinéaste et critique Jean-Louis Comolli dialoguera avec François Caillat lors d’une rencontre au cinéma Latina, le dimanche 25 novembre, à 14h de 16h.
Il y sera question des Fantômes du réel, revêtus de quelques concepts cinématographiques : le champ et le hors-champ, le cadre et le cache, le plein et le vide…

Programmation proposée par François Caillat et Hélène Coppel,
avec le soutien de Documentaire sur Grand Ecran
(du 21 au 25 novembre 2012, cinéma Le Latina, Paris).